Waltenberg de Hédi KADDOUR,

Autour de Lilstein, le maître espion, une belle cantatrice, un jeune homme de bonne famille, un ambassadeur, quelques anciens militaires et une poignée d’idéalistes vite revenus de tout forment le choeur de ce roman para-historique entre Berlin, Paris, Singapour et Moscou. L’histoire commence en septembre 1914 avec la cavalerie française et s’achève en 1991, après la chute du mur de Berlin. Elle plonge avec panache dans un monde parallèle qui préfère les conversations secrètes et les grands sentiments aux technologies de pointe.
Le projet pourrait être indigeste et dépassé, il est pétillant comme le meilleur des champagnes grâce à l’écriture impertinente de l’auteur et à sa construction croisée. Hédi Kaddour peut se permettre toutes les audaces : donner des leçons de politique, jouer au feuilletonniste, faire parler Malraux lors d’un dîner mondain. Il reste brillant sans pédanterie, passe vivement de l’anecdote à l’épopée et emporte le morceau haut la main, nous laissant 700 pages plus tard avec l’envie d’en savoir plus. Sur le XXIe siècle peut-être !
Christine Ferniot – Télérama n° 2902 – 24 août 2005
Gallimard, Paris 2005
Waltenberg d’Hédi Kaddour (LC 58 5ème), c’est un peu la rencontre de Chateaubriand avec John Le Carré : une fresque souterraine du XXe siècle, avec des « taupes » pour héroïnes, des ambassades pour décor et la Suisse pour retraite idéale. On est loin de James Bond, plutôt du côté de Balzac décrivant une comédie humaine faite de faux-semblants et de secrets d’Etat.

On prend le TGM ?


Appuyée sur sa canne, Meherzia, 78 ans, redresse le dos et lance un « Ah ! » nostalgique en se remémorant les temps où elle prenait ce même train avec sa famille ou ses amies. « On n’était jamais bousculé et on avait du respect pour les personnes âgées », se lamente-t-elle accrochée au bras de son petit-fils pour son ènième voyage à bord du TGM.
Un parasol sous le bras, l’autre enlaçant sa copine, Karim, 18 ans, s’impatiente au guichet à l’idée de commencer au plus vite une journée à la plage « il est toujours trop surchargé. Nous le prenons à défaut de faire comme les jeunes de la Jet Set qui vont à la plage en voiture », lance Karim, jouant des coudes dans la foule d’estivants : des familles entières avec couffins remplis de provisions, matériel de plage, jouets et enfants de tout âge. Mais ni lui, ni Narjess, 16 ans, ne savent que le train, qu’ils prennent pour une journée de plaisir loin de la chaleur de Tunis, est plus que centenaire.

Le premier train a été inauguré par son Altesse Mohamed Sadok Bey le 31 août 1872. La dynastie de l’époque affaiblie se payait ainsi « un caprice » sous la pression des puissances coloniales qui se disputaient la Tunisie quelques années avant l’instauration du Protectorat de la France (1881-1956). Français, Italiens,Anglais… étaient sur les rangs pour sa construction et ce sont les Anglais qui l’emportèrent.
C’est le TGM qui fut à l’origine de l’extension de Tunis vers le nord, créant ainsi ce qu’est devenue ensuite, en front de mer, la banlieue la plus prisée et la plus pittoresque.
Immortalisé par « Un été à la Goulette » du cinéaste Férid Boughdir, figurant dans tous les guides, le TGM – qui musarde sur près de vingt kms – apparaît comme une figure incontournable de la littérature judéo-francophone et les récits de voyages d’illustres écrivains de la fin du 19e et 20e siècle.

Du « train blanc » de l’époque, le service commercial de la société Métro Léger de Tunis, qui gère la ligne actuellement, ne conserve plus qu’un spécimen des voitures originales promis à un musée en gestation.
Auto oblige, le TGM a perdu un peu de ses clients (17 millions en 2003, 19,7 millions en 1998) mais son image reste liée à la recherche du plaisir, du rêve et du dépaysement.

On peut encore prendre le TGM en été pour aller à la plage, aux concerts nocturnes à l’amphithéâtre de Carthage, dîner à la Goulette, déguster une glace à La Marsa, fumer un narguilé sur les terrasses de cafés du pittoresque Sidi-Bou-said, offrant la vue la plus saisissante de la baie de Tunis.
Comme autrefois, quand les familles juives, italiennes ou musulmanes aisées fuyaient la canicule de la ville pour s’installer l’été à La Goulette…

En souvenir du charme d’antan, certains reviennent de loin pour le train de leur enfance ou de leurs parents : « Ils montent juste pour humer l’odeur ou simplement rêvasser devant les bateaux en rade du port de La Goulette », raconte Mondher, contrôleur du train.

Pour Imed, 34 ans, chef de service de la ligne, « le mythe du TGM n’existe plus que dans les livres. Avec l’urbanisation et la voiture, ceux qui le prennent sont démunis et n’ont aucune idée de son histoire centenaire ».
D’après Aâm El Mouldi (site tounes)
Entre Tunis, La Goulette et La Marsa, circule Le toujours fameux « TGM » (Tunis-Goulette-Marsa). Ce train permettant aux Tunisois de fuir la canicule, pour aller sur les plages de la banlieue nord, fut le premier moyen de transport collectif à voir le jour dans une cité africaine, il y a 133 ans.